Un réel de tous les temps est, sans doute, le temps lui-même. Les sujets ont, depuis toujours, affaire à son implacable irréversibilité. Cela sous les espèces de l'opportunité ratée, de la perte irrécupérable, du temps qui coule, de la mort…

Alors, y a-t-il du nouveau au XXIe siècle dans le rapport des sujets au réel du temps ? Un rythme s'impose au circuit de la consommation. La désuétude des objets mis sur le marché est tout autant programmée que leur apparition agalmatique. La fin incontournable de la plupart d'entre eux est la poubelle.

Pris dans la poursuite aveugle d'objets toujours nouveaux, les sujets semblent oublier leur destin de déchet. Si le passage du temps rend les objets obsolètes, le sujet est-il lui-même à l'abri de ce destin ?

L'insupportable des traces du passage du temps sur le corps, l'effort, parfois désespéré, de les effacer et toute une offre de produits et d'interventions voués à cette tâche montrent que l'ombre de l'obsolescence fait retour sur le sujet lui-même. Tant au niveau du corps qu'à celui du lien social, professionnel ou amoureux, les sujets du XXIe siècle redoutent de devenir eux-mêmes des objets vite jetables. Ils sont suivis de près par l'ombre de leur propre obsolescence programmée.

Adriana Campos
France-Argentine