L'après-midi, je lis dans le journal local un article sur le « forcené » qui fait la Une : enfermé dans son appartement, au cœur d'une petite ville angevine, il avait pris ses fusils de chasse et s'agitait en tirant, criant et menaçant.
Le lendemain matin, je me réveille sur un rêve qui clôt de justesse ce qui allait virer au cauchemar, produit en écho à un bout de réel lié au signifiant forcené. Le terme provient de l'ancien français forsener, qui au participe passé signifie ce qui est hors de sens (fors, sen), hors de mesure !
En face d'un couple dont la femme est enceinte, je fais une sorte de « repas thérapeutique » à côté d'un forcené. Le futur père lui dit quelques mots et blêmit. Qu'a-t-il-vu sur son visage ? Il se déplace doucement et fait signe à sa compagne enceinte de s'éloigner. Je me demande : « dois-je parler ? Non ! Il vaut mieux partir. » Réveil.
Dans ce rêve, le réel se loge sous le signifiant forcené, mais aussi dans le pulsionnel scopique, oral, sadique et dans la parole impossible. Forcené écrit force née indique le mouvement d'un désir qui trouve à s'incarner. Le père est là pour protéger du hors sens l'enfant à naître, mais je reste seule pour y faire face. Je prends position : je laisse ce réel qui vire en pulsion de mort pour aller vers une force de création toujours symptomatique.
Marie-Claude Chauviré-Brosseau
ECF, Angers