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« Je vous dois la vérité en peinture et je vous la dirai ! » La phrase de Paul Cézanne à Émile Bernard me pince la moelle épinière depuis longtemps.
« Je vous dois » : la contrainte est là, pointe la direction d'une éthique personnelle qui est un absolu : « Si je ne fais pas cela, à quoi bon y être. Être où d'ailleurs ? À quoi bon vivre en somme ? »
Puis vient le terme de vérité. La vérité, c'est une butée, un impossible, quelque chose qu'il n'appartient pas aux hommes d'attraper. Donc, je vous le dois, mais c'est impossible.
« En peinture » ! C'est le bouquet, si j'ose dire ! Même si tout peintre sait qu'il veut dire quelque chose avec sa peinture, le verbe dire ici provoque un hiatus, parce qu'il est posé dans deux champs différents à la fois : le faire du côté de l'acte (de peindre) et le dire du côté de la parole. C'est précisément une trace de l'impossible, un redoublement de la notion d'impossible.
Reprenons :
Le tableau fait trébucher le regard sur un objet qui doit lui dire non pas comment sont les choses, mais ce qu'elles sont : résistantes.
Emmanuelle d'Achon
Issy Les Moulineaux dans les Hauts-de-Seine