À tendre l'oreille, nous serions submergés : « Trop beau ! », « trop drôle ! », « trop » ceci ou « trop » cela. Le « trop » infiltre le parler contemporain.

Accessoire langagier tendance qui révèle – avec pertinence comme bien des futilités – une coordonnée particulière du discours : un point d'absurde qui échappe à sa logique. En tant qu'adverbe d'intensité, il prend bonne place dans l'ère d'un temps où tout se doit d'être évalué, chiffré. Mais à quantifier au plus près ce qu'il en est des émotions et de l'affect, c'est l'excès qui surgit.

Là où le sujet tente par la prise dans le langage de donner une mesure à sa jouissance, c'est l'écho d'une démesure qui se fait entendre. Par cette insistance furtive, le sujet du XXIe siècle se dit prêt à déborder et nous dévoile dans un même mouvement l'impasse du juste sens face à ce qui ne cesse pas de ne pas s'écrire.

Pour celui qui veut bien l'entendre, c'est une manifestation langagière discrète, mais révélatrice, qu'à vouloir étalonner le débordement de la jouissance, le discours du maître n'y suffit pas. Reste l'invention du sujet. Celle qui peut lui faire trouver le mètre qui lui convient.

Jérémie Mercier
Section clinique de Strasbourg