Au XXIe siècle, le père Noël a de curieuses initiatives. À cet enfant de 5 ans qui adore jouer à Un, deux, trois, soleil !, il a apporté une boîte parlante munie de capteurs de mouvements, en guise de meneur de jeu. Beaucoup de générations d'enfants ont goûté cette expérience ludique qui consiste à avancer le plus vite possible et à s'arrêter quand le meneur se retourne en prononçant le mot : «Soleil !» Les enfants doivent alors s'immobiliser dans la posture qui est la leur. Bouger, ne fusse qu'une paupière, oblige à revenir au point de départ : «Vu !»

Le petit garçon s'interroge : la voix humanoïde peut bien dire «Soleil !», et aussi «Un, deux, trois», où est passé le regard dont nous savons que le désir le loge dans l'autre, comme tache aveugle ? Il s'étonne de ne plus éprouver la grande satisfaction de se transformer en statue au moment où brusquement, la voix humaine dit avec jubilation «Soleil !»

«Regarde !», dit l'enfant à l'analyste qu'il fait témoin de son étonnement, «c'est bizarre, la machine ne voit pas !» À l'époque où le signifiant-maître est introuvable, le père Noël qui n'est que semblant, dit aux enfants : «Jouez tout seuls !» «Pas question», répond ce jeune analysant.

Jacqueline Dhéret
ECF, Lyon